Le bitcoin n’est pas une monnaie de criminel - Chapitre 2 : L'interdiction de Bitcoin

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Démystification

Le bitcoin n’est pas une monnaie de criminel - Chapitre 2 : L'interdiction de Bitcoin

Dans le chapitre précédent, nous avons pu étudier l’origine de cette idée reçue selon laquelle le bitcoin serait une monnaie de criminel. Nous avons également vu pourquoi la résistance à la censure est une caractéristique indispensable pour Bitcoin et comment son utilisation dans le cadre d’activités illicites est en réalité un test de viabilité pour ce dernier.

Puisque ce constat de l’utilisation criminelle va de pair avec une suggestion d’interdiction de Bitcoin, dans ce second chapitre, nous allons étudier l’application et les conséquences d’une telle mesure. 

L’interdiction de Bitcoin est elle exécutable ?

L’affirmation « Bitcoin est un outil de criminel » n’est pas une réflexion constructive en elle-même. Une fois que l’on a dit cela, et même si cela se révélait être vrai, quelle disposition devrions-nous prendre ? Qu’est-ce que l’on peut bien y faire ? 

Certains réagissent à cette réflexion en demandant une action simple : l’interdiction de Bitcoin. Dans cette partie, nous souhaitons savoir si l’interdiction, sous justification d’une utilisation par des criminels, est exécutable concrètement.

L’interdiction de Bitcoin ne peut être effective que sur un plan légal. Comme ce système est distribué, dans la pratique, il est impossible de l'arrêter ou d’empêcher son utilisation par les individus. Quiconque en possession d’un nœud sera toujours capable de diffuser ses transactions. L’utilisation du principe de consensus de Nakamoto établi sur la preuve de travail permet une résistance à la censure au niveau de la confirmation des transactions.

➤ En savoir plus sur le fonctionnement de la preuve de travail (Proof-of-Work).

Concrètement, ce n’est pas parce que Bitcoin est interdit que les individus ne pourront plus l’utiliser. Ce serait même assez facile de contourner la loi sans se faire repérer. En effet, la majorité des nœuds Bitcoin communiquent avec leurs pairs sous Tor, et sont donc difficilement détectables.

Tor (The Onion Router) est un réseau informatique décentralisé permettant d’anonymiser les connexions en masquant les adresses IP des utilisateurs et en chiffrant leurs communications.

De surcroît, les criminels continueraient d’utiliser Bitcoin puisqu’ils sont déjà dans l’illégalité avant même de choisir une méthode de paiement. En conséquence, une interdiction de Bitcoin pénaliserait certainement les citoyens dans la légalité et les entreprises du secteur, mais sûrement pas les criminels. 

Quelles seraient les conséquences d’une interdiction de Bitcoin ?

Bitcoin n’est que du code. C’est un système informatique, c’est un outil. Comme tout autre outil, il peut être utilisé de manière constructive et de manière destructive. Par exemple, le marteau peut certes être utilisé pour aller frapper un autre individu, mais il est surtout largement utilisé pour bâtir de beaux édifices. 

Une civilisation qui interdit des outils sous justification de leurs utilisations les plus marginales fait un pas vers l’autoritarisme et tend naturellement vers la pauvreté généralisée. Si l’on interdit le marteau, quelles en seront les conséquences ? Toutes les entités constructives qui utilisaient spécialement cet outil, de manière licite, seront les plus impactées. Elles pourront planter des clous avec le manche des tournevis, mais ce sera bien moins efficace. En revanche, les personnes qui en faisaient une utilisation illicite ne seront pas tellement affectées par cette interdiction. En effet, un déséquilibré qui voudra frapper son voisin, s’il n’a plus accès au marteau, prendra un couteau, un rouleau pâtissier, ou encore une bouteille en verre. L’opération ne sera pas rendue moins efficace. 

Il faut donc bien comprendre que l’interdiction d’outils, sous prétexte de leurs utilisations marginales, nivelle notre société vers le bas tout en n’empêchant pas les criminels de sévir.

Par ailleurs, lorsque le bitcoin est utilisé par des criminels, il ne constitue qu’un petit paramètre dans leurs opérations. Prenons l’exemple des rançongiciels, ces virus qui chiffrent un ordinateur et demandent le paiement d’une rançon, parfois en bitcoins. Pour réussir cette opération, le pirate utilise un ordinateur connecté à internet. Il dispose sûrement aussi d’une chaise et d’un bureau. Le matin, il mange peut-être une banane pour avoir un apport en sucre suffisant lors de la programmation de ce virus. Puisque cette opération est criminelle, est-ce que l’utilisation d’internet l’est aussi ? Est-ce que les tables, les chaises et les bananes sont des outils de criminel ? Je ne pense pas. Toutefois, si l’on interdit ces paramètres, pensez-vous que cela aurait empêché l’attaque informatique ? Non, le pirate peut remplacer la chaise par un tabouret, il peut remplacer la banane par une pomme, et surtout, il peut remplacer le paiement en bitcoins par un règlement sur un autre système de transactions.

Cet argument n’est pas nouveau. Il avait déjà été exposé par le célèbre développeur Bitcoin Gregory Maxwell, lors d’un message d’introduction de l’idée du CoinJoin sur le forum Bitcoin Talk en 2013. Cette idée de Maxwell sur le CoinJoin peut évidemment être étendue à Bitcoin de manière plus générale : 

En réalité, les vrais criminels n'ont pas besoin de CoinJoin, [...] ils peuvent se permettre d'acheter la confidentialité d'une manière que les utilisateurs réguliers ne le peuvent pas, c'est juste un coût supplémentaire pour leur entreprise (souvent très lucrative).

Conclusion

Ce poncif de l’utilisation de Bitcoin par des criminels est en réalité un moyen pour demander son interdiction. Néanmoins, comme vous avez pu le découvrir dans ce second chapitre, une interdiction de Bitcoin serait inexécutable sur le plan technique. 

Par ailleurs, cette éventuelle interdiction ne serait absolument pas efficace pour lutter contre les criminels. Au contraire, cela affecterait en premier plan les acteurs licites de cet écosystème, ce qui contribuerait à niveler notre société vers le bas.

Dans le chapitre suivant, nous étudierons le modèle de confidentialité de Bitcoin. Nous apprendrons que ce n’est pas forcément un outil optimal pour les criminels.

➤ Découvrir le chapitre 1 de cette série.

➤ Découvrir le chapitre 3 de cette série.

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