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Le minage de Bitcoin ne s'arrêtera pas en 2141

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À l’heure où j’écris cet article, près de 19 400 000 bitcoins ont déjà été minés et sont en circulation. Tous ces bitcoins ont été progressivement distribués aux mineurs qui ont trouvé des blocs valides. Cela permet de les rémunérer en échange de leur travail.

Toutefois, la masse monétaire totale de bitcoins est limitée à 21 millions d’unités. À moins de venir casser le consensus, on ne pourra jamais en émettre un seul de plus. Il est donc tout à fait légitime de se questionner sur ce qui se passera une fois la limite atteinte. Est-ce que les mineurs, alors privés d’une partie de leur rémunération, vont subitement s’arrêter de participer à la preuve de travail ? C’est ce que nous allons analyser dans cet article.

Quel est le rôle des mineurs sur Bitcoin ?

Les mineurs prennent part au processus de la preuve de travail (Proof-of-Work). Leur rôle est de rassembler les transactions Bitcoin en attente de confirmation dans un bloc candidat. Le mineur doit ensuite trouver une valeur à ajouter dans son entête, de telle sorte qu’une fois passé dans une fonction mathématique aléatoire, cela donne un résultat inférieur à un nombre cible. C’est un travail par tâtonnement.

Ce mécanisme, c’est ce que l’on appelle la preuve de travail, et ça permet de protéger le système Bitcoin face aux attaques Sybil. En effet, en demandant aux mineurs de faire ce travail de calcul, on leur impose un coût marginal non négligeable à la multiplication des votes. Autrement dit, cela permet de protéger le système de paiement face aux actes malveillants.

Évidemment, ce travail engendre des coûts pour le mineur. Il doit dédier du temps de processeur à cette activité et, surtout, consommer de l'électricité. Il est donc impératif de rémunérer ces mineurs pour les encourager à travailler de manière honnête. Au plus cette rémunération est élevée, au plus les mineurs sont incités à brancher leurs machines pour tenter de récolter des bitcoins. Il faut alors comprendre qu’il existe une forme de proportionnalité entre le montant de cette récompense et le niveau de sécurité de Bitcoin.

➤ En savoir plus sur le mécanisme de preuve de travail (Proof-of-Work).

Comment sont rémunérés les mineurs de Bitcoin ?

Lorsqu’un mineur trouve un bloc valide, il peut se rémunérer grâce à deux sources différentes. Premièrement, il a le droit de récupérer l’intégralité des frais alloués pour les transactions incluses dans son bloc. Secondement, il a le droit de créer une quantité prédéfinie de bitcoins à partir de rien. Ces rémunérations sont récoltées grâce à une transaction spécifique que l’on nomme « Coinbase ».

Cette création monétaire par les mineurs est strictement limitée par les règles du protocole. Au lancement de Bitcoin en 2009, ils avaient le droit de créer 50 bitcoins par bloc. Cette somme est ensuite divisée par deux tous les 210 000 blocs, grâce au mécanisme des halvings. Par exemple, en ce moment, les mineurs peuvent créer 6,25 bitcoins à chaque nouveau bloc trouvé.

En réduisant progressivement cette récompense, nous arriverons à un stade où plus aucun bitcoin ne pourra être créé par les mineurs. Cet événement devrait avoir lieu aux alentours de l’an 2141, au bloc n° 6 930 000.

Que se passera-t-il lorsque le dernier bitcoin sera miné ?

Passé cet évènement, la rémunération des mineurs reposera donc exclusivement sur les frais qu’ils pourront récolter au sein des transactions incluses dans leurs blocs.

Toutefois, il est important de comprendre que ce passage d’une rémunération établie sur la création monétaire, à une rémunération établie sur les frais, se fait de manière progressive. En effet, plus de 92 % des bitcoins sont d’ores et déjà en circulation aujourd’hui. Graduellement, la part de la création monétaire devient de plus en plus marginale pour les mineurs dans leur rémunération. Par exemple, du bloc 6 720 000 au bloc 6 929 999, la subvention dans chaque bloc sera à peine d’un seul satoshi.

Ainsi, ne voyez pas l’an 2141 et la fin de la création monétaire sur Bitcoin comme un événement soudain. En réalité, il ne se passera pas grand-chose lorsque le dernier bitcoin sera miné, puisque la part de cette subvention dans le chiffre d’affaires des mineurs sera marginale bien avant cette date. Le minage ne s’arrêtera donc pas subitement au bloc 6 930 000.

📌 Le saviez-vous ? Les frais d’une transaction Bitcoin sont calculés en faisant la différence entre le total des entrées (inputs) et le total des sorties (outputs).

Y aura-t-il un marché de frais suffisant sur Bitcoin ?

On peut donc légitimement se demander si les frais de transaction, à eux seuls, suffiront pour rémunérer les mineurs. Lorsque l’on regarde les mempools en ce moment, on se rend compte que la part des frais dans leur rémunération totale semble être minime. Cette part oscille généralement entre 0,5 % et 10 % de leurs gains.

Cependant, durant de courtes périodes, on a déjà pu observer un rapprochement entre la part des frais et la part de la subvention. Par exemple, durant l’épisode des BRC-20 au début de cette année 2023, les frais de transaction ont rapidement explosé. Preuve en est, dans le bloc n° 788 695, les frais de transactions sont même supérieurs à la subvention elle-même.

Grâce à la limitation de la taille des blocs, dès qu’il y a beaucoup de transactions qui arrivent, le marché incite les utilisateurs à surenchérir et les frais augmentent rapidement. L’espace de bloc devient rare, et la variable d’ajustement est le taux de frais par rapport au poids de chaque transaction.

Finalement, Bitcoin aura simplement la sécurité qu’il mérite. S’il devient l’étalon monétaire mondial, de nombreuses entités seront prêtes à payer des frais astronomiques pour faire passer leurs transactions en priorité. Le taux de frais par transaction va donc exploser, ce qui va inciter les mineurs à brancher plus d’ASICs. La sécurité du système sera alors très élevée, et ce sera cohérent avec l’importance qu’aura pris Bitcoin.

Au contraire, si le bitcoin demeure une monnaie utilisée en marge, les frais resteront faibles. La sécurité sera moins élevée, mais ce sera cohérent avec la faible valeur échangée sur le système.

➤ Découvrir le fonctionnement des halvings sur Bitcoin.

Est-ce que l’émission résiduelle est une bonne solution pour Bitcoin ?

Face à cette inquiétude sur la fin progressive de la subvention de bloc, certains bitcoiners proposent d’implémenter un système d’émission résiduelle. L’idée est d’assurer aux mineurs une rémunération minimum à chaque bloc. Ce mécanisme impose donc une forme d’inflation perpétuelle sur le système monétaire. Mais en réalité, sur le plan technique, l’émission résiduelle n’a pas réellement d’intérêt.  S’il n’y a pas suffisamment de frais sur Bitcoin, elle ne suffira pas à alimenter artificiellement la sécurité du réseau. Cela n’introduit pas une limite basse à la sécurité, mais bien une limite basse à la subvention de bloc.

Ce qu’espèrent les promoteurs de cette stratégie, c’est que le montant choisi comme subvention fixe sera suffisant pour assurer la sécurité du réseau, sans pour autant créer une inflation importante. Le problème, c’est que ce niveau de sécurité minimal est en réalité dynamique, et qu’il dépend d’innombrables facteurs externes. Parmi ces facteurs, on peut citer : la valeur du bitcoin, l’efficience des ASICs, le prix de l’énergie, les capacités de l’attaquant…

L’émission résiduelle vient uniquement tenter de fixer un plancher à un seul de ces facteurs. D'abord, il est impossible de savoir si ce montant choisi arbitrairement représente le bon niveau. Ensuite, cela ne permet pas d’assurer la sécurité au niveau global, puisque celle-ci dépend de nombreux autres facteurs que le protocole seul ne peut pas maîtriser.

Finalement, la rémunération des mineurs sur Bitcoin n’est qu’un prix. Elle représente une information unique pour que les acteurs du système puissent bien se positionner au sein du marché. Si l’on tente de manipuler ce prix, notamment en introduisant l’émission résiduelle, on observera un mauvais positionnement des acteurs de l’écosystème, puisque l’information première sera faussée. En bref, une éventuelle implémentation de l’émission résiduelle empêchera les mineurs de s’adapter aux variations de l’utilisation de Bitcoin, et donc de proposer un niveau de sécurité cohérent.

Dans tous les cas, quelle que soit l’option choisie, l’argent magique n’existe pas. Lorsque la rémunération des mineurs repose sur un marché de frais, ce sont les utilisateurs qui financent la sécurité du système en effectuant des transactions. C’est vers ce système que nous nous dirigeons graduellement avec Bitcoin. Au contraire, lorsque la rémunération des mineurs repose sur la subvention de bloc, comme avec l’émission résiduelle, ce sont alors les épargnants qui financent la sécurité du réseau par dilution du pouvoir d’achat de leur monnaie.

Conclusion

Le minage de Bitcoin ne s’arrêtera pas en 2141. Quand la création monétaire via la subvention de bloc sera terminée, les mineurs pourront toujours bénéficier des frais de transaction. Cette transition se fait de manière progressive grâce au mécanisme des halvings qui divisent par deux la subvention tous les 210 000 blocs.

À partir du bloc 6 930 000, la sécurité de Bitcoin dépendra entièrement des frais de transaction. S’il y a beaucoup d’utilisateurs, il y aura beaucoup de frais. Les mineurs pourront donc continuer de déployer beaucoup de hashrate, dans l’espoir de gagner les récompenses de bloc.

Ainsi, tant qu’il y aura des utilisateurs prêts à payer des frais pour faire passer leurs transactions sur Bitcoin, il y aura forcément des mineurs pour récolter ces récompenses.

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