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Bitcoin : la réglementation démystifiée (feat. William O’Rorke)

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Bienvenue dans le deuxième épisode des interviews “Comprendre Bitcoin” de Bitstack, l'émission qui décrypte l’univers du Bitcoin dans un langage simple, clair, accessible à tous.

Alexandre Roubaud, cofondateur et CEO de Bitstack, a eu le plaisir d’accueillir William O'Rorke, avocat associé chez ORWL avocats, cabinet de conseil spécialisé dans les projets crypto et web3 sur des sujets juridiques et réglementaires.

Dans cet épisode :

➜ L'évolution réglementaire du bitcoin et de la crypto.
➜ La signification et l'impact du PSAN.
➜ MiCA : défis et perspectives.
➜ Les répercussions de l'affaire FTX.
➜ Prévisions sur le futur de la réglementation et du bitcoin.

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L’introduction du cadre réglementaire crypto avec la loi PACTE

Pour commencer, il faut comprendre que le législateur ne s'intéresse qu'à des sujets qui concernent suffisamment de monde. Avant 2019, le bitcoin et les cryptomonnaies étaient trop petits pour être un sujet suffisamment important à traduire dans une loi.

A l'époque, je m'en souviens que quand je disais “je m'intéresse au bitcoin”, les gens me demandaient ce que c’était, et on entrait dans une discussion sans fin.

La loi PACTE est internenue juste après une période d'euphorie qui est arrivée en 2017 - 2018, période à laquelle il y avait notamment les ICO, un phénomène grand public. Les ICO, ce sont des offres de tokens. A ce moment-là, c'est devenu un sujet suffisamment important pour faire l'objet d'une loi.

Et dans la loi, il y a toujours un phénomène intéressant. On commence à travailler sur une loi pour une raison, qu’on finit un peu par oublier, et à la fin on aboutit à autre chose.

Eh bien, c'est exactement ce qu’il s’est passé.

La loi PACTE, au début, ça a été fait pour les ICO. Et à la fin, en fait, on s'est rendu compte que ce qui était important, ce n’était pas tant les ICO, c'était plutôt ces acteurs financiers qui étaient un peu “exotiques”. Ceux qui se disaient “ben nous, on va faire la même chose que la finance traditionnelle, mais avec des crypto monnaies”.

La question était : “comment est ce qu'on transpose les règles de la finance traditionnelle à cette nouvelle finance”. Et la loi PACTE, c'est une première étape. D'où la création de ce statut de “PSAN” (prestataires de services sur actifs numériques enregistré auprès de l’Autorité des marchés financiers). Les PSAN aujourd’hui sont la même chose que les intermédiaires dans le monde financier.

À l'époque, le régulateur s'est dit : “quel est le minimum qu'on peut demander à un acteur qui va vendre du bitcoin avec pignon sur rue ?”. À savoir qu’en France et en Europe, nous sommes dans des pays avec des sujets de blanchiment, de fraude fiscale et de sensibilité au risque qui sont importants. Donc ça a été la première étape. Aussi, il y a eu le sujet de l'honorabilité de la compétence. C'est-à-dire, on va regarder qui sont les gens qui font ces activités, les personnes qu’il y a derrière. C’est vraiment la base de la base.

Et ça, c’est le régime PSAN de 2019 à aujourd'hui. Les acteurs qui voulaient exercer en France devaient remplir ces conditions.

Qu’est-ce que le statut PSAN a apporté à l’écosystème ?

[La loi PACTE a instauré en France le statut de prestataire de services sur actifs numériques (PSAN). Ce statut couvre les activités de conservation d’actifs numériques pour le compte de tiers, l’achat-vente d’actifs numériques contre une monnaie ayant un cours légal ou contre d’autres actifs numériques, l’exploitation d’une plateforme de négociation d’actifs numériques, d’autres services sur actifs numériques comme la réception et transmission d’ordres pour le compte de tiers, la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, le conseil, la prise ferme, le placement garanti et le placement non garanti.]

Sur le moment, le PSAN, ça a été un traumatisme parce que la crypto est un secteur qui n'est pas très pro-réglementation. Surtout à l'époque. C'est quelque chose qui a diminué dans le temps. Mais en fait, il y a eu un changement comme assez notable car avant le PSAN, il y avait une suspicion d'illégalité très forte sur toutes les activités liées au crypto.

Il y avait quelques acteurs qui, avant le PSAN, se faisaient fermer systématiquement leurs comptes bancaires. Les gens qui travaillaient chez ces acteurs se faisaient aussi fermer leurs comptes bancaires. Ils avaient une réputation de participer à des schémas de blanchiment, de financer le terrorisme.... Il y avait beaucoup de fantasmes, évidemment. Mais il faut bien comprendre que pour le reste de l'industrie financière et bancaire, le fait de ne pas être régulé et de fournir des activités qui sont financières, c'est quelque chose qui était incompréhensible.

Est-ce que les banques se sentent à risque vis-à-vis des acteurs crypto ?

J'ai un biais d’avocat sur ce sujet. Je comprends très bien ce discours anti-innovation de la part des banques. Et il faut être lucide, les banques restent des acteurs économiques qui font du lobbying et qui défendent leurs intérêts. Il faut comprendre que les banques ont des énormes obligations réglementaires à mettre en œuvre. Ça coûte cher, elles le font avec les moyens du bord, elles sont énormes, c'est compliqué à piloter, elles n’ont pas forcément beaucoup de rendement et d'argent à aller chercher dans la crypto, donc c'est plus simple de fermer que de se dire “on va prendre un cabinet de conseil sur six mois qui va nous prendre 80 000 € pour essayer de détailler si on peut bancariser tel ou tel acteur”.

Le bilan de la BNP, c'est plus gros que le PIB français. Donc il faut se mettre à leur échelle. Je ne dis pas ça pour les défendre parce que ça n'empêche pas que ça reste des comportements et des actes que je combats personnellement pour le compte de mes clients, je vais au tribunal pour demander des dommages intérêts, je fais jouer des mécanismes de droit aux comptes pour forcer les banques à garder des comptes bancaires, donc qu'on s'entende bien, je suis coté crypto, mais par contre, le discours de dire que c'est une réunion des banquiers français qui se disent “on va se payer la crypto”, je pense qu’en fait ce n’est pas tout à fait ça. C’est beaucoup plus simple que ça.

L’intérêt du statut PSAN pour le consommateur

Si vous avez envie d'avoir un rapport à la crypto qui est un rapport d'épargnants averti moyen, passer par un PSAN me paraît être la base parce que’il s’agit d’un acteur qui est supervisé par un régulateur, les actionnaires et les dirigeants sont identifiés, donc identifiables en cas de problème, c’est un acteur avec lequel une médiation est possible par le prisme de l'AMF, l’Aurotité des marchés financiers. C'est l’un des gros apports du PSAN.

Pour un consommateur, la lutte contre le blanchiment ou le terrorisme, ce n’est pas son problème. Leur sujet c'est : “est ce qu'ils vont partir avec mon argent ? Et si oui, qu'est-ce que je fais ?”.Avant le régime PSAN, beaucoup de clients venaient nous voir en disant “j'ai investi dans une boîte basée aux Seychelles et ils ne répondent plus”. Nous, on ne peut rien faire. On envoie des mises en demeure, mais je ne suis pas le FBI, je ne peux pas aller en hélico aux Seychelles pour récupérer l'argent. Donc en fait, on ne pouvait rien faire.Avec les PSAN, vous pouvez intervenir. Vous saisissez l'AMF, c'est gratuit, ça prend moins de trois mois, et neuf fois sur dix, il y a une solution qui peut être trouvée avec l’aceteur PSAN très rapidement, gratuitement, sans passer par la case tribunal. Et si ça ne suffit pas, vous pouvez aller devant un tribunal, et vous avez en face une société immatriculée en France ou en Europe, c'est-à-dire qu'elle est dans une zone où il y a de la coopération judiciaire, donc vous avez une voie de recours. Et c'est aussi un avantage pour les acteurs PSAN. C'est une sécurité énorme de se dire qu’on va être jugés selon un cadre réglementaire qui existe et par l'intermédiaire d'un régulateur qui me connaît, qui connaît mon activité.Des deux côtés, on connaît les règles du jeu.

Pour un acteur PSAN, il n’y a rien de pire que d'être jugé, avec tout le respect que j'ai pour la magistrature, par un magistrat d’un tribunal d'instance parce qu’on passe les trois quarts de l'audience à expliquer ce que c'est que le bitcoin, et à la fin, il y a un côté où on a parfois l'impression que ça se joue aux dés. Je caricature, mais vous voyez. Moi, je préfère avoir affaire à un régulateur financier.

Introduction de MiCA et différences entre l’enregistrement et l’agrément PSAN

MiCA est un règlement européen qui va encadrer les PSANs partout en Europe.C'est un approfondissement territorial. Il n’y aura plus un régime spécifique en France, un autre en Pologne, un autre en Allemagne, etc. De Porto à Tallinn, vous allez avoir les mêmes règles pour tout le monde. L’acteur français pourra faire de la communication et faire de la promotion vers les clients d'Estonie, et le service estonien pourra faire de la publicité dans le métro parisien sans avoir à demander des autorisations locales.C'est aussi un approfondissement en termes de protection pour l’épargnant. L’enregistrement PSAN, c’est une protection a minima. Là, il va y avoir des règles de protection beaucoup plus complètes. On va obliger les prestataires à avoir ce qu'on appelle des fonds propres, c'est-à-dire à avoir, en fonction de leur volume d’activité, un certain montant, un cousin de sécurité financière, pour encaisser des chocs. Alors qu'aujourd'hui, il y a des acteurs qui géraient des milliards d'euros de flux, alors qu’ils n’avaient zéro euro leur appartenant pour rembourser en cas de pépin. Au moindre grain de sable, le truc explosait.

Il y a aussi d'autres règles. Par exemple, on va avoir des règles de prévention des abus de marché. Pour le dire simplement, aujourd'hui, vous avez des bourses crypto sur lesquelles le prix se forme (si le bitcoin vaut 26 532 $ à un instant t, c'est parce que sur trois bourses crypto, on le trouve à ce prix-là en moyenne). La formation de ce prix, la finance a montré qu'on pouvait avoir des comportements délictueux ou frauduleux : faire des faux ordres, avoir des gens ayant accès à des informations privilégiées et qu'ils utilisaient pour trader, …, en gros de la fraude financière. Aujourd'hui cette fraude n’est pas encadrée dans la crypto. Donc aujourd'hui, on sait qu'il y a des abus de marché qui sont commis. On ne sait pas quand, on ne sait pas combien, mais ça a un effet sur le prix. Avec MiCA, vous allez avoir ce type de règles qui vont être mises en place.Avec MiCA, la crypto va être au même niveau de réglementation que le reste de la finance

Le cadre fiscal en France, quelles implications ?

Le cadre français a eu un effet simplificateur sur deux aspects.

Déjà, on ne prend pas en compte les transactions crypto - crypto. Ce qui compte, c'est quand vous sortez de la crypto. Si vous utilisez vos bitcoins pour acheter un bien ou pour faire un cashout en Fiats en euros, c'est à ce moment-là que ça crée ce qu'on appelle “un fait générateur d'imposition”. C'est beaucoup plus simple parce que si vous vous débrouillez bien, vous restez en stablecoin ou en crypto, vous pouvez faire vos trades, et en fait vous payez des impôts quand vous utilisez vraiment votre crypto “dans l'économie réelle”.

L'autre aspect simplificateur, c'est la flat tax qui s'applique aux instruments financiers. Elle est de 30 % en France sur les plus-values réalisées (les gains). Si vous ne gagnez pas d’argent, vous ne payez pas d’impôts.

Adoption de la directive DAC8 : quel impact ?

Cette directive, c'est l'idée simple que pour surveiller les mouvements de capitaux, il faut qu'il y ait un partage d'informations entre les différents pays et entre les différents acteurs. Ça existe depuis longtemps dans la finance traditionnelle. Là, c'est juste que ça a été transposé à la crypto.

D’ici l’entrée en vigueur le 1er janvier 2026, si vous ouvrez un compte dans une plateforme d'échange au Japon, en Corée ou aux États-Unis, l'administration fiscale française peut aller demander de l'information. Ça prend du temps, mais c’est possible. Là, ce qu’il va se passer une fois l’entrée en vigueur de DAC8, c'est que les plateformes dans chaque pays vont faire remonter l'information automatiquement, et les administrations fiscales des pays qui sont signataires ou qui sont membres vont pouvoir avoir de l'information sur, en gros, ce que vous avez en crypto sur telle ou telle plateforme. C'est intrusif, mais ça permettra de lutter contre la fraude fiscale.

Il faut savoir ce qu'on veut. Si on ne veut pas de la réglementation, on reste un secteur économique sans intérêt, qui sera en marge de la société. C'est selon moi la condition pour être acceptés dans le reste de l'économie et que la vision commune des gens sur la crypto ne soit plus “un truc pour blanchir et pour frauder”. Il faut se soumettre aux mêmes règles que celles de la finance traditionnelle. Je ne vois pas de raisons que mes parents subissent des règles sur les instruments financiers et que moi je ne les subisse pas sur les cryptos. À un moment, il faut équilibrer les choses.

Les difficultés des acteurs crypto pour se mettre en conformité pour MiCA

Il faut comprendre une chose très macro et très globale : le secteur crypto a été régulé extrêmement vite. C'est intéressant parce que l'origine était très “libertaire, rebelle, anti-réglementation”, et la réalité, c’est qu’à mon avis aucun secteur n'a été régulé aussi vite. On est passés de “rien” à “mise à niveau avec des réglementations qui ont 40 ans en 5-6 ans”. C'est hyper rapide. Pour les services de paiement, c’est un chemin qui avait duré quinze ans. La réglementation bancaire, c'est 70 ans.MiCA, c'est une étape à franchir qui est extrêmement importante. En fait, sous l'empire de l'enregistrement PSAN dans sa version de 2019 - 2020, il suffisait seulement d'être tech ou entrepreneur pour accéder au marché français. Il y a des gens qui ont créé des boîtes avec peu d'argent. Ils ont réussi à aller chercher leur PSAN avec les dents, à accéder à ce marché, et ça a créé de belles histoires. Il y a aussi eu des ratés.

En ce moment, on est en train de passer à une “fintechisation” de la crypto. Aujourd'hui, faire l'agrément PSAN (qui est plus contraignant que l’enregistrement PSAN) ou l’agrément MiCA, ça coûte cher. Et ce n'est pas qu'une question d'argent. Il faut recruter des profils, il faut avoir un esprit et une culture réglementaire. Tout ça crée des conditions d'entrée qui sont beaucoup plus élevées et qui font que les profils qui vont y arriver ne vont pas être les mêmes. Concrêtement, si vous ne pouvez pas lever quelques centaines de milliers d'euros voire quelques millions d'euros, comme dans le reste du secteur FinTech, ça devient très compliqué. Alors qu'avant un PSAN coûtait quelques dizaines de milliers d'euros.

Donc c'est ça pour moi le gros changement, et c'est quelque chose qui va être visible par les consommateurs.

MiCA : un avantage pour les acteurs agréés vs. les acteurs internationaux ?

C'est intéressant parce que je parlais exactement de ce sujet-là avec un avocat américain il y a 2 jours, qui du coup avait le prisme US. Ce qu'on se disait, c'est que la réglementation, c'est jamais un avantage compétitif en soi, c'est jamais l'avantage compétitif ultime. On est régulés sur un marché où on a quelque chose à faire. La régulation suit le projet, et pas l'inverse. C’est pas “j'ai MiCA donc je vais devenir un super projet Bitcoin”, et heureusement.

MiCA, ça va être la condition pour accéder au marché européen, qui est un gros marché, on parle de 400 millions d'européens. MiCA est un avantage parce que ça apporte de la clarté. Cette clarté est un avantage énorme par rapport à ce qu’il se passe aux États-Unis. Aujourd’hui aux États-Unis on ne sait pas trop comment se conformer à la réglementation. Il y a des injonctions contradictoires. Il y a des agences qui se font un peu la guerre, ça se règle devant les tribunaux. C'est vraiment le négatif de MiCA. MiCA, c’est beaucoup de règles mais au moins il y a de la clarté, c'est publié deux ans à l'avance, et cetera. On peut critiquer le niveau des exigences qui est élevé, mais les États-Unis, c'est vraiment “on vous jette dans la piscine, et si vous arrivez à rejoindre le bord, bingo”.

Je pense que là où il y a quand même un effet économique qui va être important avec MiCA, c'est qu'on va avoir un marché unique sur le plan réglementaire, ce qui va favoriser un phénomène d'homogénéisation des acteurs en Europe.

C'est-à-dire qu'un bon acteur local pourra devenir un acteur régional. Et à l'inverse, ce sera aussi un avantage pour les gros acteurs mondiaux qui vont pouvoir beaucoup plus facilement se mettre en conformité sur 27 pays à la fois.

Est-ce que MiCA va devenir l’exemple sur la réglementation crypto mondiale ?

Je ne suis pas très chauvin. Je suis pas très “cocorico” en mode “je pense pas qu'on va être un modèle pour le monde”. Mais par contre, ce qui est sûr, c'est tout simplement que MiCA est un texte financier. Quand on fait un peu de droit financier, on se rend compte qu'il y a des règles qui sont un peu les mêmes, quelle que soit l'activité. MiCA, ça va être un modèle dans le sens où c'est la première fois qu'on a quelque chose d'écrit, de posé, et qui concerne tout le marché. Après, est-ce que les gens vont faire un copier-coller, je ne pense pas. Ils vont adapter. Et encore une fois, la réglementation, ça reste quelque chose qui est régional.

C'est sûr que pour les Américains aujourd'hui, ça doit faire bizarre de se dire que de l'autre côté de l'Atlantique, eux, ils ont toutes les réponses aux questions qu'on se pose dans un texte qui est opposable à l'équivalent de la SEC. Encore une fois, la réglementation, elle contraint, mais elle protège aussi les acteurs. Après, je suis sûr qu’aux États-Unis, on les connaît, ils sont violents. Là, ils sont violents dans la répression. Je suis sûr qu'à un moment ils vont pivoter, ils vont être violents dans le sens pro-réglementation. En tout cas sur leur marché, je pense que ça va bien se passer.

Le rôle de l’affaire FTX sur l’accélération de la réglementation

En réalité le lien de FTX avec la réglementation est colossal. L’affaire FTX, ça a vraiment été un des rares moments de la crypto, avec aussi le sujet de Libra qui est le stablecoin de Facebook, où tous les comités des banques centrales, les régulateurs, les ministères de l'économie et les boards de toutes les grosses banques mondiales ont eu des réunions  sur la crypto. Ça a été les deux moments.

Ça a été “on va peut être se faire ubériser par Facebook et ça c'est pas ok”, et d'ailleurs ils ont coulé le projet, et ça a aussi été “en fait la crypto, non seulement il y a des scandales qui sont possibles, mais ils ils commencent à être importants”. C'est un secteur qui est capable de faire du Madoff. C’est un secteur qui peut être vraiment dangereux, avec des millions de gens qui ont perdu de l'argent. Et donc évidemment que pour la réglementation, il y a eu un changement de braquet qui a été important, parce qu’aux États-Unis, ça a donné du grain à moudre à la SEC qui est un régulateur plutôt agressif avec la crypto, qui veut vraiment entrer la crypto dans le droit financier, un peu au pied de biche, avec un marteau. Et en France on l'a vu. C'est-à-dire que le renforcement réglementaire, ça a été une conséquence logique. Et je le sais parce que j'ai eu la chance d'avoir des réunions là-dessus avec quelques décideurs, et ils me disaient “en fait, vous nous dites que vous avez besoin de temps et cetera, mais c'est pas le sujet. Il y a FTX, il y a des victimes, donc maintenant on va renforcer”. Il y a eu des échelons, c'est pour ça qu'on a eu un enregistrement PSAN renforcé, une licence optionnelle, et cetera. L'idée, c'est de faire des marches pour remonter jusqu'à MiCA, mais le débat de repousser MiCA, c’était fini.

L’affaire FTX, est-ce que ça pourrait se reproduire ?

C'est une très bonne question. La vie est ironique, parce qu’en fait, FTX n'a rien à voir avec la crypto, et FTX a peu avoir avec la réglementation.

C'est Madoff. Et Madoff, il était régulé. C'était un type qui avait sa carte, sa licence, et cetera. Donc en fait, quand quelqu'un produit des faux et est suffisamment intelligent pour mentir bien, ça peut durer longtemps, et ça peut faire très mal. Quel que soit le système.

Après, là où il y a un bémol quand même, et on en parlait juste avant l'émission, c'est qu'avec FTX, il y a eu d’abord la fraude FTX, et qu’après il y a eu la contagion dans le secteur crypto. Cette contagion pourrait être limitée par la réglementation qui va imposer d'avoir des contrôles entre acteurs et d'avoir notamment ce fameux coussin de sécurité avec ce niveau de fonds propres, donc il y aura quand même une différence post-MiCA.

FTX, c'est de l'escroquerie, c'est de la fraude. Donc Sam Bankman-Fried, SBF, c'est quelqu'un qui va très probablement aller en prison pour pas mal de temps. Il est présumé innocent pour l'instant, mais bon, quand même, c'est ça le sujet.

FTX était régulé aux Bahamas, ils étaient régulés par le régulateur des Bahamas qui a encore prouvé qu'il avait une exigence très forte sur les acteurs locaux. Non mais bon, très sérieusement, c'était un acteur non régulé qui a mis en lumière un peu un retard dans le secteur crypto mondial. C'est-à-dire que le fait qu’il y ait des acteurs aux Bahamas, ou aux Seychelles, et que tout le monde trouve ça ok, ce n’est pas normal.

Ça, c'est quelque chose qui est en train de changer, notamment avec la réglementation, notamment suite au contrecoup de l'affaire FTX. Mais moi, quand j'en parlais avec des avocats en droit financier traditionnel, expérimentés, ils me disaient “en fait, ton secteur, c'est la finance des années 70”. Il se passait les mêmes choses il y a 30 ans ou 40 ans en Finance.

L’impact de la réglementation sur l’adoption du bitcoin et le cours

La réglementation, c’est un facteur d’accélération. Encore fois, si on se met à six mois, ça n'a pas d'effet, voire des effets négatifs parce que ça ralentit les entrepreneurs. Mais la démocratisation implique la réglementation. Et c'est très logique en fait. La réglementation, c'est l'inverse du “do your own research”, c’est l’inverse du “débrouillez-vous, on est entre connaisseurs, on est une communauté”.

Je m'en souviens, la communauté Bitcoin à Paris, il y a 6-7 ans maintenant, tout le monde se connaissait. Donc en fait ça se réglait au café presque. Je caricature, mais c'était des liens interpersonnels. Bon, ça, ça fonctionne à 200. Mais bon, quand on a 8 % des Français qui ont de la crypto, c'est fini.

La loi sur les influenceurs

La loi influenceurs part d'un constat très simple. Si on en revient au concret, il y a une dérive dans le monde avec les influenceurs. On le sait, et c'est devenu un sujet. Les députés en entendait parler le dimanche quand ils allaient faire le marché et serrer la main de leurs concitoyens. C'est ça l'origine de la loi sur les influenceurs, c'est pas autre chose.Il y a 30 députés qui commencent à se dire “ouh là, c'est un sujet national”, et hop, ça a été une proposition de loi transpartisane, adoptée très rapidement parce que consensuelle, alors qu'on est dans une Assemblée nationale où, je le rappelle, il n'y a pas de majorité absolue.

Et il se trouve que la crypto, ça a été le support de pas mal de comportements dérangeants ou préjudiciables de la part de certains influenceurs dont d’ailleurs beaucoup ne sont pas en France mais à Dubaï.

Ils ont créé une loi, on a eu des débats. D'ailleurs, on avait rencontré lors d'une conférence Stéphane Vegeta qui était le rapporteur de la loi et qui est venu en débattre. Ils ont fait une loi pour réglementer certaines pratiques faites par les influenceurs, et notamment l'interdiction en gros de promouvoir des crypto monnaies, tokens, NFT, …, sauf quand c'est en conformité avec la réglementation (= sauf quand l’acteur derrière le projet a enregistrement PSAN). En gros, c'est une idée où on demande aux influenceurs qui sont hors du champ de la réglementation financière, de respecter la réglementation financière.

Personnellement, j'ai deux doutes sur cette loi.

Le premier, c'est que le monde financier est un monde où il y a des sociétés identifiées, il n'y en a pas 300 000, on les connaît, elles ont pignon sur rue. Elles ont des moyens humains, elles ont une roadmap pour se mettre en conformité. Par contre, les influenceurs, je ne sais pas ce que ça recouvre. Pour moi, c'est un secteur où il y a des centaines de milliers de personnes, on peut être influenceur avec 400 followers, on peut être un micro influenceur, donc ce truc de se dire “on va réguler des gens qui sont totalement atomisés”… j'y crois pas trop. C'est pourquoi j'ai un doute sur l'efficacité.

Et l'autre point, c'est qu'à mon sens, les députés qui ont travaillé sur cette loi n'ont pas suffisamment eu le temps, ou n'ont pas suffisamment pris le temps, de comprendre comment fonctionnait le monde financier. Pourquoi il n'y a pas de problème avec les influenceurs et les instruments financiers ? Parce que le monde financier, et ce sera le cas de la crypto avec MiCA, contrôle sa communication parce qu'il est supervisé par son régulateur financier. Ça fait partie de tout ce cadre réglementaire dont on parlait.

Aujourd'hui, on est un peu dans un entre-deux. Pour la crypto, il n'y a pas de contrôle de la communication, mais ça viendra dans très peu de temps. Dans un an, on n’aura plus besoin de cette loi, parce que les acteurs qui vendent de la crypto devront contrôler leur communication, sinon ils auront automatiquement affaire à leur régulateur financier qui pourrait leur retirer leur licence.Donc moi, cette loi, je la comprends, et je pense qu'elle est nécessaire dans l'absolu, mais je pense que sur la crypto il y a eu un problème de coordination avec la réglementation financière.  On va se retrouver avec deux régimes en parallèle, qui régulent la même chose de la même manière.

PSAN, MiCA, loi influenceurs… fin de course pour la réglementation crypto ?

C'est pas du tout la fin. Il y a en ce moment d'autres sujets mais qui sont loin du bitcoin. Il y a notamment les NFT et les jeux Web3 qui sont en train d'être régulés.

Aujourd’hui, pour la partie finance de la crypto il y a un cadre qui est en place, ça va de la décision d'investir à la fiscalité des gains. Donc la boucle est bouclée, même si ça va évoluer en permanence.En revanche, ce qui est intéressant, c'est que cette technologie, elle n'a pas vocation à s'arrêter aux cas d’usages financiers. Elle est en train de “contaminer”, si je peux m'exprimer ainsi, d'autres cas d'usage dans le jeu vidéo, il y a des CRM Web3, …, et ça amène donc de nouveaux sujets.

Actuellement, ce sont les jeux Web3, donc des jeux comme Sorare par exemple, ou des jeux avec des cartes NFT, qui sont en train d'être encadrées. Il s’agit d’un sujet qui a émergé, il y a un an et demi, et aujourd'hui on a une loi. Donc pareil, c’est un nouveau régime.

Et peut-être que dans trois ans, on aura une loi les NFTs artistiques ou les NFTs commerciaux faits par des grandes marques. Et dans dix ans, il y aura d'autres sujets qu'on ne connaît pas aujourd'hui.

Les prédictions personnelles de William sur le bitcoin

J'ai quelques convictions sur le bitcoin.Je ne le vois pas comme quelque chose qui va remplacer l'euro, je le vois plus comme une sorte de police d'assurance. C'est-à-dire que lorsqu’il y a des chocs dans le secteur traditionnel, le “système”, je pense que le bitcoin en profite.

C'est aussi une forme d'investissement dans toutes ces technologies. À la fois le protocole Bitcoin et tout ce qu'on appelle la blockchain. Investir en bitcoin, c'est une manière de s'exposer à ça et de faire un pari sur ce sujet, un pari qui pour moi est gagnant.

Après, en termes de prix, je n'ai pas tellement de prédiction. J'aime bien la théorie de Yves Choueifaty qui dit que ça va être “soit zéro, soit plus d’un million”. Sa théorie se base il me semble sur le fait que le bitcoin va remplacer l’or. Donc en fait, étant donné la quantité limitée de bitcoin disponible en circulation, son prix sera extrêmement élevé. Pour moi, ce n’est pas tellement le sujet, parce que c’est intéressant uniquement pour les pesonnes qui peuvent acheter un bitcoin entie, alors qu’en fait, au fur et à mesure, on achétera des satoshis (des centimes de bitcoin).

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